Briser les guerres invisibles
et les blessures qui se transmettent en silence
1/ Hommage et renaissance
Ce texte est un hommage à mon père. Il est parti en 2016, emportant avec lui une histoire qu’il n’a jamais racontée et en me laissant le silence comme héritage.
Aujourd’hui, j’écris pour que son silence devienne mes mots, pour que son courage devienne ma vérité, pour transformer ce qu’il a tu en lumière et en liberté pour ses petites-filles.
Ce texte est aussi un cadeau que je me fais, la preuve que j’ai compris, la trace de ma guérison, un acte d’amour envers celle que je suis devenue.
Mon père était un homme de guerre devenu un homme de terre. Il avait connu l’exil, la peur, la violence, et pourtant, il a choisi la vie, la patience, la reconstruction.
Au moment où lui quittait ce monde, je vivais ma propre guerre : celle d’un couple devenu champ de bataille. J’essayais la paix. On m’imposait le conflit. J’ai vacillé. Mais je suis restée debout et digne, parce que la mort de mon père m’a rappelé une chose essentielle : je n’avais pas le droit de tomber. Et pourtant… je n’ai pas pu pleurer mon deuil. Je l’ai vécu en silence, seule face à tout, seule face à l’absence, seule face à ma propre survie. (🎧 À écouter ma chanson : « Les Fils du Silence » )
Mais l’Histoire, quand elle n’a pas fini d’être comprise, revient souvent sous une autre forme. Ce n’est plus dans mon couple que la guerre est revenue, c’est à travers mes enfants. Encore une fois, j’ai voulu le dialogue. Et encore une fois, on m’a imposé le combat.
On a voulu me salir, me faire passer pour une mauvaise mère, me retirer la garde de mes propres filles, comme si protéger mes enfants était une faute. On a enquêté sur moi, fouillé ma vie, cherché la moindre faille pour donner raison à la violence. J’ai été traînée dans la boue par des mensonges que je n’aurais jamais imaginés un jour entendre à mon sujet.
J’ai pleuré, j’ai suffoqué sous l’injustice…
Mais chaque matin, je me suis relevée —
pour mes filles,
pour ma vérité,
pour mon cœur de mère.
Longtemps, j’ai cru que l’autorité était toujours du côté du juste, que ceux qui portent un uniforme étaient forcément là pour protéger.
Mais quand l’uniforme est utilisé comme un bouclier pour l’ego ou comme une arme contre les siens, alors ce ne sont plus les valeurs qu’il représente qui brillent, mais la violence qu’il dissimule.
J’ai failli ne plus croire en la justice, ni en une société meilleure, jusqu’à ce que je comprenne mon père : ce n’est pas l’uniforme qui fait l’honneur, mais le cœur de celui qui le porte.
L’été 2025, tout s’est terminé. Enfin. Je suis reconnue comme la mère que j’ai toujours été. Les années d’adolescence de mes enfants ont été volées par cette guerre que je n’ai jamais voulue. Ce n’est pas moi qui ai voulu ces guerres. Mais elles sont venues, encore et encore, comme si la vie voulait me dire : Tu dois parler. Tu dois guérir. Tu dois rompre le silence.
Je ne veux plus de ces guerres invisibles, de ces blessures qu’on prétend imaginer, de cette souffrance que personne ne voulait voir.
Ce silence, mon père le portait dans ses cicatrices.
Mais moi, je refuse de le transmettre.
Alors j’écris, je dessine. Pour lui. Pour mes enfants.
Pour toutes celles et ceux qui ont vécu des guerres que personne ne voit..
Voici l’histoire d’une guerre silencieuse : celle d’un père qui a choisi la paix après la violence, et celle d’une femme qui a refusé de se taire face à l’uniforme utilisé comme un pouvoir. Elle vous dévoile la vérité de l’uniforme : celle qui n’apparaît que lorsque l’on regarde le cœur de l’homme qui le porte.
2/ La vérité de l’uniforme
Je n’ai pas grandi avec un père en uniforme. J’ai grandi avec le mystère de l’homme de celui qu’il avait été : un soldat devenu agriculteur, un héros silencieux devenu homme de terre.
Un jour, il m’a prêté son ancien uniforme et son béret pour une soirée déguisée. (Il l’a gardé précieusement). Il était tout fin, comme moi. Je suis entrée dans ce costume comme on entre dans une histoire qu’on ne connaît pas. À travers ce vêtement, je pouvais imaginer un peu du jeune homme.
Il était militaire, décoré de la Légion d’honneur, un homme discret et profondément humble. Il ne parlait jamais de la guerre. Il avait vu la mort, la peur, l’abandon. On l’avait laissé pour mort, et pourtant… il est revenu.
Je n’ai jamais vu l’horreur dans ses gestes, seulement dans ses silences. Il a choisi la terre pour reconstruire sa vie. Il a semé la vie là où il avait connu la mort.
Plus tard, j’ai de nouveau croisé l’uniforme dans ma vie de femme. Mais cette fois, l’uniforme n’était pas un symbole d’humilité. Il est devenu une armure d’orgueil, un masque d’autorité.
J’ai connu la peur, l’angoisse qui serre la poitrine, le regard qui contrôle tout. Mes enfants aussi. Il est facile de jouer au héros dehors. Le vrai courage se voit à la maison, dans la manière dont on traite ceux qu’on aime.
Mon père, lui, était un vrai Monsieur.
Il n’a jamais eu besoin de réclamer le respect.
Il l’inspirait par sa bonté, son silence et sa dignité.
Il n’a jamais cherché à se faire admirer : il vivait simplement, avec la vérité de sa vie.
L’autre, celui qui portait l’uniforme se prenait pour un grand homme.
Il voulait être appelé Monsieur. Il voulait que je reste à ma place, que j’exécute, que j’admire. Et je l’ai fait.
C’est ainsi que j’ai compris : le respect ne se réclame pas. Il se mérite.
Le vrai Monsieur, c’était mon père.
L’autre n’était qu’un uniforme vide.
Et vous comprendrez pourquoi le plus grand homme que j’aie connu ne portait plus d’uniforme. Et si cet uniforme a marqué sa vie, il a aussi marqué la mienne — mais d’une toute autre manière.
3/ Quand l’uniforme devient une arme psychologique
Ce qui me révolte le plus, ce n’est pas l’uniforme en lui-même. C’est ce qu’il devient entre de mauvaises mains.
◆ La guerre qui a voulu me faire taire
Comment peut-on se dire protecteur en faisant la guerre à sa propre famille ?
J’ai connu l’angoisse. Mes enfants aussi. Des peurs qui prennent toute la place, qui coupent le souffle, qui brouillent l’envie de vivre.Tout cela au nom du pouvoir. Jamais au nom de l’amour.
Et même après la séparation, la violence n’a pas cessé pour autant. J’ai connu les menaces, les intimidations, les tentatives de me faire taire, jusqu’à vouloir m’effacer de mon propre site,
comme si raconter mon histoire était un crime.
À un moment, un procès a même été engagé au tribunal des enfants. Il m’a reproché mon témoignage, prétendant que je cherchais à influencer mes filles à travers mon site. Il a même tenté de me réduire au silence, en exigeant que je le ferme. Mes enfants ne lisent pas mon site. Elles ne s’intéressent pas à mon univers artistique… Tout comme moi, enfant, je ne trouvais pas mon épanouissement dans le travail de la terre que mes parents ont dû porter. Nous avons chacun notre voie, nos passions, nos propres chemins pour grandir.
Je veux simplement dire la vérité, tout simplement : quand quelqu’un fait mal, il faut le nommer. Dire ce qui blesse n’est pas vouloir nuire — c’est ouvrir la voie à la réparation. J’apprends à le faire pour moi, et j’apprends surtout à mes filles qu’elles ont le droit de dire quand elles souffrent : la parole remplace le silence, et la communication sauve les liens. Je cherche à me guérir, à comprendre, à transformer, pour que le silence et la douleur ne se transmettent plus.
◆ La guerre qu’il a portée en silence
Mon père aussi avait connu une guerre invisible. À 22 ans, il s’est engagé dans l’armée en pensant y trouver un refuge, un avenir, une famille. Mais il y a découvert une autre forme de violence : des balles qui menacent le corps, et le racisme qui tente de briser l’âme.
Il n’a pas seulement vu des ennemis mourir. Il a vu des frères d’armes se retourner les uns contre les autres, des vies fauchées pour des motifs qui n’avaient rien à voir avec la guerre. Des morts absurdes, impossibles à justifier, impossibles à oublier.
Il a été laissé pour mort — et pour survivre, il a appris à se taire. Car certaines horreurs ne peuvent pas se raconter, et certaines vérités font plus peur encore que les bombes.
Alors, quand la guerre s’est arrêtée, il a aussi quitté la France. Il a trouvé une terre de chaleur et de respect : Tahiti. Là où l’on regarde le cœur et où il était possible de semer la paix. Il n’a jamais demandé qu’on l’admire. Il voulait juste vivre, humblement, avec ses silences et toute la dignité qu’ils contenaient.
J’aurais voulu qu’il me raconte son histoire. J’aurais voulu connaître ses cicatrices, sa résilience, l’homme qu’il avait été avant d’être mon père. Il aurait eu tant à dire. Mais il a choisi le silence comme on choisit de survivre. J’ai grandi avec ce manque : le regret de ne jamais avoir découvert ce trésor qu’il portait en lui. Il répétait qu’il vivrait jusqu’à 100 ans. Alors j’ai cru que j’aurais le temps… le temps d’écrire un jour son histoire, à deux.
Ceux qui portent l’uniforme ont tenté de réduire mon père, puis moi, sa fille. Et pourtant… Nous sommes toujours là. Debout. Plus forts. Plus lucides. Car un homme qui utilise le pouvoir et la loi comme une arme ne peut pas se vanter de représenter le respect ni les valeurs qu’il exige des autres. Ce texte n’est écrit pas contre une personne. Il est écrit pour toutes les femmes et tous les enfants qui ont un jour été brisés par quelqu’un qui aurait dû être leur refuge.
4/ Il semait la vie, je sème la lumière
Il existe un conte que j’aime particulièrement : L’Homme qui plantait des arbres.
À chaque fois que je le vois, c’est mon père que je revois.
Il avait ce don unique de faire pousser n’importe quel légume.
Semer, pour lui, c’était réparer le monde.
Et il partageait tout.
Ses amis repartaient avec le coffre rempli d’abondance.
Cette générosité, c’était son amour rendu visible.
Il disait peu, mais il donnait beaucoup.
Derrière ces terres agricoles magnifiques, il y avait pourtant le travail d’une famille entière : nous, ses enfants, lui, un homme marqué par la guerre, reparti de zéro pour reconstruire une vie, un foyer, et un avenir loin de ses blessures d’avant, de ses origines.
Travailler la terre était rude. Ce n’était pas un rêve d’enfant, mais un héritage de survie. La résilience de mon père était devenue notre réalité.
Mon père n’a pas été parfait. Il a parfois été absent, pris au piège de ses propres traumatismes.
Enfant, je cherchais sa présence, son regard, son amour. Et comme beaucoup d’enfants blessés dans le silence, j’ai voulu retrouver mon père à travers un autre homme : un homme en uniforme, pensant que je pourrais enfin comprendre ce qu’il n’avait jamais dit.
Mais ma paix à moi n’était pas dans la terre. Mon combat à moi n’était pas celui du sol. Mon combat a été une guerre intérieure.
Mon père a choisi le silence. Moi, j’ai choisi la parole.
Mon père a enfoui sa souffrance sous la terre.
Moi, je la transforme en conscience et en guérison.
Lui, il semait des graines de vie dans la terre, à la sueur de son front, dans un monde qui se voit.
Moi, je sème des graines de sens, dans l’invisible, dans le cœur des gens, à travers mes cartes, mes illustrations et l’univers de Princesse Papillon.
Nous plantons tous les deux, mais pas dans le même sol. Lui a fait pousser des légumes pour nourrir les corps. Moi, je fais pousser des histoires pour nourrir les âmes. Sa résilience s’exprimait en silence, la mienne passe par la parole et la créativité. Parce que certaines graines ne poussent pas dans la terre, mais dans la lumière que l’on transmet.
(Vous pouvez découvrir mes 6 univers symboliques ici : L’univers Authentique de Princesse Papillon – https://universauthentique.phonghg.fr/)
◆ L’héritage de mon père
J’ai compris que mon cœur cherchait, à travers l’amour, à comprendre ce que mon père n’avait jamais dit. Il avait survécu à la guerre extérieure. Moi, je devais survivre à une guerre intérieure.
Dans les deux cas, le mot qui guérit est le même : DIGNITÉ.
C’est dans mon art, dans ma vérité, dans mes enfants, que j’ai retrouvé mon salut !
Aujourd’hui,
je ne me tairai plus.
Je ne cacherai plus.
Je n’aurai plus honte.
Mon père m’a transmis la plus belle force : continuer à aimer la vie malgré les blessures. Il a choisi la terre pour réparer son monde. Moi, je choisis les mots et la lumière pour guérir le mien. Il m’a montré que la paix ne se proclame pas : elle se cultive, doucement, dans le silence du cœur (semblable à L’Homme qui plantait des arbres) . Et c’est cela que je veux offrir à mon tour : une transmission de lumière, de vérité, et de paix intérieure.
Si j’ai brisé le silence qui me précède, c’est aussi pour donner à chacun le courage de regarder sa propre histoire.
5/ La fin des guerres invisibles
Briser les guerres invisibles et les blessures qui se transmettent en silence

Il existe des guerres dont personne ne parle.
Elles ne font pas d’éclats,
elles n’ont ni drapeau, ni monuments.
Elles se vivent à l’intérieur.
Ce sont ces batailles silencieuses
que l’on porte sans jamais les avoir choisies :
les traumatismes transmis sans mots,
les peurs héritées,
les croyances qui enchaînent,
les hontes dont on ignore même l’origine.
Ces guerres-là traversent les générations.
Elles passent d’un cœur à l’autre,
comme une blessure qui cherche à se réparer
mais ne trouve pas comment.
Mon père a survécu à la guerre du dehors.
Moi, j’ai survécu à la guerre du dedans.
Nous avons porté des douleurs différentes
mais issues du même silence.
► Lui, il a choisi de ne rien dire.
► Moi, je choisis de tout dire.
Parce qu’on ne guérit pas
ce que l’on cache.
Parce qu’on ne libère pas une famille
en portant le poids des anciens.
Briser la transmission du traumatisme,
cela ne veut pas dire trahir nos parents.
Cela signifie honorer leur courage
en allant là où ils n’ont pas pu aller.
Guérir, ce n’est pas tourner le dos au passé.
C’est oser le regarder en face,
pour que nos enfants puissent, un jour,
le regarder sans peur.
Alors j’écris.
Je transforme ce qui m’a détruite
en quelque chose qui me construit.
Je parle pour lui.
Je parle pour moi.
Je parle pour elles,
mes filles.
Afin que la chaîne du silence
s’arrête ici.
Avec moi.
Grâce à moi.
Briser les guerres invisibles,
c’est transmettre un héritage nouveau :
la liberté d’être soi,
la dignité de dire “non”,
et la force de devenir
l’amour que l’on n’a pas reçu.
🎧 Ici, les mots prennent vie en musique.
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◆ Ce qui s’arrête avec moi : la fin des guerres héritées
Mes filles ont longtemps pensé qu’il fallait se taire pour respecter un parent, alors que parfois, ce sont les parents eux-mêmes qui blessent le plus, en imposant la peur, la honte ou la culpabilité là où l’amour devrait toujours être.
Elles ont connu des angoisses qui coupent le souffle, la peur de déranger, la peur de décevoir, la peur même d’exister. L’une a souffert en silence, l’autre s’est tenue à ses côtés, portant un secret trop lourd pour son âge. Elles pensaient devoir attendre leurs 18 ans pour enfin respirer loin de la toxicité d’un parent. Mais le cœur de la plus jeune s’est fissuré trop tôt… et l’aînée s’est crue coupable de n’avoir pas su la protéger, elle qui avait porté le silence par amour.
Toujours le silence.
Toujours cette idée que « ça ne se dit pas ».
STOP.
Plus jamais le silence pour protéger l’autorité d’un adulte.
Plus jamais croire qu’un enfant doit se sacrifier pour préserver un parent toxique.
Plus jamais souffrir dans l’ombre.
Je veux que mes filles sachent qu’elles ont le droit de parler, le droit d’être entendues, le droit de dire : “Ça fait mal.”
Même si celui qui fait mal est un parent.
Briser les guerres invisibles, c’est refuser que les blessures se transmettent.
C’est offrir à ses enfants un avenir où la lumière remplace la peur.
À partir d’elles, l’histoire change.
Et vous… que faites-vous de vos blessures ?
Les cachez-vous pour survivre ?
Ou osez-vous les transformer pour vivre ?
A découvrir….
Coluche et la dignité des vrais hommes
Coluche disait qu’on ne devrait pas glorifier la guerre à travers les défilés, car la guerre ne devrait jamais être célébrée. Il rappelait que le vrai hommage va aux blessés invisibles, aux survivants qui portent le silence plutôt que les médailles.
Et dans mon histoire, c’est exactement ce que je vois à travers mon père. C’est un homme qui a connu la guerre, mais qui ne s’en glorifie pas. Il n’en tire ni fierté, ni haine, seulement le silence humble de celui qui sait. Il a vu l’horreur, il a survécu, et il a choisi de se taire plutôt que de transmettre la violence.
Il incarne cette vérité que peu de gens comprennent :
la vraie dignité n’est pas dans la médaille,
elle est dans le refus de reproduire la violence
Mon père n’a jamais cherché à être admiré. Il a simplement voulu vivre, planter, nourrir, exister autrement. Et c’est là toute la différence avec ceux qui, aujourd’hui encore, se cachent derrière un uniforme pour exiger le respect. Le respect, le vrai, ne se commande pas. Il s’inspire, il se mérite, il naît du cœur.
Mon père incarne exactement cela : la dignité de celui qui a vécu l’horreur et qui a choisi de ne pas transmettre la violence. Il ne célèbre pas la guerre : il célèbre ceux qui ne sont pas revenus. Il se rattache à ceux qui comprennent sans parler. La vraie grandeur n’est pas dans la médaille, mais dans l’humanité retrouvée.
Et je crois que c’est ce que mon père m’a transmis, sans mots, sans discours : une leçon de paix, une leçon de retenue, une leçon d’humanité.
Dans son silence, il y avait plus de vérité que dans bien des discours d’hommes puissants.

